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Série « Les femmes camionneuses » – Article 1: le camion dompeur
Série d’articles
Vous avez l’habitude de lire mon train de vie quotidien en tant que femme camionneuse du Québec. Cette fois, j’ai voulu faire différent en vous parlant d’autres femmes aussi exceptionnelles les unes que les autres.
Je vous ferai découvrir le métier de camionneur en profondeur, un article à la fois, sous plusieurs sujets et aspects différents. Je veux vous ouvrir les yeux sur le métier et montrer que les femmes y ont leur place et peuvent y exceller autant que les hommes. Des grosses machines, on aime ça, nous aussi!
Je vous propose donc une série d’articles sur différents types de transports. Je vous plongerai dans l’univers des camionneuses du Québec, un type à la fois, en commençant avec une journée en camion dompeur avec Marie-Ève Berardelli-Maurais.
L’information par les femmes
Le premier type de transport dont je vous parlerai est le transport en camion dompeur. Puisque qu’ici, chez Chicks And Machines, ce sont les femmes qui donnent l’info, j’ai interviewé Marie-Ève afin de vous faire découvrir ses journées dans ce métier.
Bien entendu, chaque compagnie a ses destinations, ses types de matériaux ainsi que sa propre routine au travail, donc vous ne pouvez pas prendre pour acquis que vous vivrez exactement les mêmes journées qu’elle en vous lançant dans ce type de transport. En revanche, il y a énormément de similitudes entre les compagnies, ce qui peut vous donner une bonne idée de ce que cet emploi implique et demande.
Le transport en camion dompeur en général
Qu’est-ce que ça transporte, un camion dompeur? Pour Marie-Ève, conductrice de camion dompeur 4 essieux depuis maintenant 4 ans, c’est principalement des produits agricoles. En premier lieu, elle transporte du maïs, de l’avoine, du blé, de l’orge et de fève de soya.
Pour ces produits, puisqu’ils sont prévus pour la consommation humaine, la benne doit impérativement être propre au moment du chargement. Pour ce faire, Marie-Ève a uniquement besoin de passer le balai au fond. Lorsque nécessaire, elle peut se rendre dans une station de lavage prévue à cet effet pour un nettoyage plus en profondeur.
Récoltés chez les agriculteurs et transportés dans les meuneries, les produits qu’elle transporte sont généralement destinés à être transformés en barres tendres, en céréales ou en moulée pour animaux. Il est possible, lors de périodes précises durant l’année, que Marie-Ève transporte de l’engrais ou encore de la chaux.
De plus, il n’est pas rare qu’elle transporte des « sous-produits », par exemple du canola, qui est aussi amassé chez les agriculteurs.
Horaire
Comme bien des types de transport, le dompeur 4 essieux en produits agricoles n’est pas un transport comportant un horaire fixe établi. Le chauffeur est responsable d’arriver sur les lieux du chargement selon le rendez-vous donné par son répartiteur. Il est également responsable d’arriver sur les lieux du déchargement pendant les heures d’ouverture de celui-ci, ce qui demande une bonne gestion du temps.
Marie-Ève part le dimanche ou le lundi dépendamment de sa destination et de l’heure de son rendez-vous. Bien entendu, elle est soumise aux mêmes lois que tous les camionneurs en ce qui a trait aux réglementations sur les heures de conduite, donc elle doit bien calculer ses déplacements et ses temps de chargement/déchargement.
Ces dites réglementations vous seront expliquées plus en détail dans un prochain article.
Type de route
La route pour ce type de transport est généralement ce qui varie le plus d’une compagnie à une autre. Dans le cas de notre belle Marie-Ève, elle part 5 jours et dort généralement tous les soirs dans son camion, excepté pendant la grosse période de récoltes où elle fait principalement du local.
La raison pour laquelle elle ne dort pas dans son camion lors de la grosse période de récolte est que la production chez les agriculteurs est tellement élevée, que les camionneurs doivent rester proches du lieu de ramassage afin d’augmenter le nombre de voyages effectués. Moins il va loin pour livrer, plus vite il est revenu pour recharger.
La compagnie pour laquelle elle travaille effectue ses opérations au Canada, soit partout au Québec, dans les Maritimes et en Ontario.
Portrait d’une journée typique en dompeur
J’ai eu envie de vous plonger dans l’univers de Marie-Ève en lui demandant de me décrire comment se passe une de ses journées, du matin jusqu’au soir, et ainsi vous faire découvrir un peu plus en détail ce que le travail demande.
« Mes semaines en général ne sont jamais pareilles et c’est ça que j’aime le plus de mon travail, les nouveaux défis (clients).»
Ça commence par…
Tout d’abord, elle débute sa semaine en récupérant les feuilles de route et autres documents nécessaires afin de compléter les livraisons. C’est son répartiteur qui lui remet toutes ses destinations. En plus de devoir noter chaque détail de ses déplacements journaliers, Marie-Ève doit inscrire chacun de ses voyages ainsi que le kilométrage du camion à chaque changement de province.
Tout au long de sa semaine, elle débute sa journée en faisant sa ronde de sécurité afin de s’assurer que l’équipement est conforme et qu’il n’y a aucun bris. Elle répète cette vérification en arrivant chez ses clients par mesure de précaution.
Pour son type de transport, elle doit avoir en tout temps avec elle une pelle, un balai, ses outils et un « squeegee » pour bien entretenir ses vitres et miroirs. De plus, sa toile électrique est une composante clé à son type d’équipement, elle doit veiller à ce qu’elle fonctionne correctement.
Les vérifications de la toile sont importantes si on veut éviter les accidents et problématiques. Étant attachée aux deux extrémités par une corde, il peut arriver que ladite corde lâche, faisant ainsi voler la toile des deux côtés. Il peut aussi arriver que le ressort dans le tuyau de la toile brise, ce qui nécessite une réparation immédiate puisque la toile ne pourra plus lever.
Pendant la journée
Une fois prête à partir, Marie-Ève est complètement autonome. Ce que je veux dire, c’est qu’elle connait toutes ses destinations et toutes ses heures de rendez-vous dès son départ. Elle ne perd donc jamais de temps entre chacun de ses voyages pour connaître la prochaine destination et est responsable de gérer son horaire.
Les endroits où elle se rend sont généralement ouverts de 6h à 17h (avec quelques rares exception), donc elle roule principalement de jour. Le temps passé sur la route varie selon le temps d’attente et le temps de chargement/déchargement chez les différents clients.
La benne est généralement chargée directement par la sortie des silos chez les plus gros clients. En revanche, le cultivateur demande habituellement d’être averti une heure à l’avance de son arrivée afin de préparer son matériel.
Lors de la grosse période de récolte, il n’est pas rare que les camions soient chargés directement avec la batteuse de l’agriculteur. Chaque minute sauvée compte.
Puisque certains sont mieux équipés que d’autre, les temps varient entre 15 minutes ou 1 heure 30 minutes pour charger/décharger un camion. De plus, les temps d’attente afin de commencer l’opération chez les différents clients sont tout aussi variables; chez certains, il n’y a aucune attente, mais en de rares occasions, ça peut aller jusqu’à 12 heures.
Déchargement
Décharger un camion dompeur efficacement dépend entièrement de la fonctionnalité de la pompe hydraulique ainsi que de la démographie. En effet, tel que mentionné plus haut, c’est grâce à la pompe qu’il est possible de faire lever l’extrémité de la benne afin d’en faire glisser son contenu sur le sol.
ATTENTION, la démographie a aussi un rôle primordial dans le déchargement d’un camion dompeur. Il est très important que le camion soit positionné sur une surface bien droite dans toute sa longueur ET sa largeur.
Pourquoi ? Si le camion est mal positionné, le risque de verser sur le côté est grandement accentué.
Poids
Étant entièrement responsable de sa cargaison, Marie-Ève doit s’assurer d’être légale en poids. Elle pèse donc son camion avec une balance numérique ce qui facilite grandement la précision du chargement.
Le poids règlementaire se sépare en 3 parties sur un camion. Pour un 4 essieux il en va ainsi;
- Le poids sur la direction – 5500 KG maximum
- Le poids sur les essieux de tractions (tandem)- 18000KG maximum
- Le poids sur le derrière de la remorque – 30 000 KG maximum
Poids total autorisé incluant le poids de l’équipement – 57 500 KG maximum
Si l’un ou l’autre de ces poids est en infraction parce que supérieur à la limite maximum, le camionneur ainsi que la compagnie recevront une amende.
*À noter que lors de la période de dégel au Québec, le poids réglementaire est considérablement diminué.
Gestion de temps
Camionneuse depuis maintenant 7 ans, Marie-Ève a développé certaines habiletés mécaniques qui réduit nettement la perte de temps en cas de bris. En effet elle est capable de réparer elle-même un bris mineur: un tuyau de liquide de refroidissement fendu, par exemple.
Pour les plus grosses réparations, comme la pompe à hydraulique qui décide de ne plus fonctionner, elle doit demander assistance. Sans cette pompe, il est impossible de lever la benne pour décharger son contenu.
Cette capacité est un grand atout non négligeable pour un camionneur en termes de gestion de temps.
Fin de la journée
Une fin de journée pour Marie-Ève c’est un peu de ménage, une ronde de sécurité et dodo. En revanche, il y a beaucoup plus à faire lorsque la semaine de travail est terminée.
Lorsqu’elle arrive au terminal, Marie-Ève remplit tous ses documents en prenant bien soin d’inscrire le nombre d’heure travaillées, le nombre de kilomètres parcourus dans chaque province, le nombre de destinations (clients) visitées ainsi que la quantité exacte de carburant mise dans le camion.
Ayant un camion et une benne attitrés, elle peut faire une ronde de sécurité, s’occuper du ménage intérieur et quitter se reposer pour sa fin de semaine la tête tranquille. Il arrive qu’elle aide son superviseur à effectuer quelques réparations mécaniques sur son équipement au cours de la fin de semaine.
De plus, sa compagnie engage un laveur pour nettoyer l’extérieur des camions. Elle part donc se reposer sachant que son équipement sera entièrement propre à son retour. Malgré que son équipement lui soit attitré, Marie-Ève prend soin de récupérer tous ses effets personnels au moment de rentrer à la maison.
<< Je suis toujours passionnée et j’adore mon travail. >>
Conclusion
Type de marchandise, type de route, type de client et la manutention spécifique à ce type de transport, cet article vous donne une bonne idée de ce dans quoi vous vous lancez si vous choisissez le camion dompeur.
Je l’ai déjà mentionné: il y a beaucoup de similitudes entre les compagnies, mais ne vous attendez pas à vivre exactement les journées de Marie-Ève à la lettre. Néanmoins, il s’agit d’un emploi dynamique et diversifié dans lequel on ne s’ennuie pas!
Tu es une femme qui aime conduire de grosses machines? Alors j’espère que cette lecture saura te donner envie de te lancer dans le métier de camionneuse de camion dompeur!
Merci à Marie-Ève Berardelli-Maurais d’avoir répondu à toutes mes questions de façon aussi détaillée.
De votre Chicks,