Écrire l’Histoire à Pleine Vitesse : Catherine McKenzie marque un tournant pour les femmes dans les sports motorisés!

Qui est donc cette femme exceptionnelle?

Cath McKenzie, c’est elle qui m’a accueillie la première fois sur la piste à Montmagny, alors que je venais d’avoir mon permis apprenti 3 semaines auparavant. Je vais m’en rappeler toute ma vie :

« Bienvenue au Paradis de la Moto! » qu’elle me lance avec un de ces sourires comme j’en ai rarement vu!

Je ne savais pas à ce moment-là que c’était sa première saison en tant qu’instructrice chez Pete Moto, ni qu’elle avait commencé à faire de la piste uniquement l’année précédente sur cette même piste. Ça faisait longtemps qu’elle voulait l’essayer mais, elle avait toujours des freins : elle ne voulait pas y aller seule, elle était gênée, elle craignait le jugement.

En fait, depuis qu’elle est toute petite, c’est une grande timide. Elle pratiquait la danse compétitive, mais, elle avait peur de tout : du tonnerre, de la pluie, du bruit, de la vitesse, des manèges… elle a appris à faire du vélo seulement à 7 ans. Elle me raconte en riant que ses parents commençaient à être tannés de courir en arrière d’elle… À ce moment-là, je présume qu’eux non plus ne se doutait pas qu’un jour, petite Cath McKenzie allait poser le pied sur la première marche du podium!

C’est son fiancé Vanya qui l’a initiée à la piste en lui disant que pour apprendre, c’était chez Pete Moto qu’il fallait aller. Ça faisait déjà 6 ans qu’elle conduisait sa moto sur la route. Elle cherchait une autre activité qui lui procurerait le même « feeling » que la danse, quelque chose qui lui donnerait un objectif, un challenge.

Sa première fois sur la track, elle n’a pas dormi la veille tellement elle était stressée. À ce moment-là, elle non plus ne se doutait pas que 2 ans plus tard, elle serait la première femme à remporter la première place aux Super Series!

Et c’est là, le 28 août 2021, sa première fois sur la track, malgré toutes ses craintes, qu’elle a eu le déclic : l’adrénaline, le focus, la technique, les objectifs, l’analyse… Simplement W.O.W. À nouveau la seule fille dans son cours de moto, mais cette fois-là, elle « bottait les fesses » aux autres apprentis! Elle se rappelle son premier coach, Guy Labonté, qui lui a dit : « Bon, vas-y tu seule! ». Lui, il avait vu le potentiel.

Cet été-là, elle est retournée sur la piste 13 fois en 1 mois et demi. Elle faisait l’aller-retour de Montréal/Montmagny à moto pour ses journées de formation. Elle n’était pas très rapide, selon elle, mais la technique et la progression étaient là. Constatant le potentiel, Pete lui offre de devenir instructrice l’été suivant. Après réflexion et discussion, son conjoint et elle décident de déménager – rien de moins – pour accepter cette offre.

L’été 2022 fût mémorable : elle a passé l’été entier à donner des cours de moto et apprendre de plusieurs instructeurs. Elle n’a que d’éloges pour son mentor : Pete excelle dans l’enseignement de sa passion. Il a su la guider, lui donner confiance, la coacher. Il s’adapte à ses élèves.

Il y a eu des moments difficiles, où le doute et des pensées négatives envers elle-même l’envahissent. Il y a parfois des frustrations, des plateaux, du perfectionnisme : Pete est encore là pour la rassurer. Il sait dire ce qu’on a besoin d’entendre pour avancer et s’améliorer. Elle avait en tête de courser. Son objectif, cet été-là : obtenir sa licence de course.

C’est avec beaucoup d’émotions qu’à la fin de la saison, Pete lui remet son certificat en lui disant qu’elle est prête à voler de ses propres ailes!

Pourquoi courser?

Avant de se lancer au début de la saison 2023, elle a douté. Est-ce que c’était pour elle? Pourquoi investir autant d’argent? Est-ce qu’elle allait être « bonne »? Est-ce qu’elle allait aimer ça? N’ayant pas roulé de l’hiver, elle se sentait moins confiante. Elle n’était plus sûre que c’était pour elle.

Les « Bikers » comprendront : quelques belles sorties d’autoroute plus tard, celles où on peut vraiment pencher notre moto, ont été son nouveau déclic pour que son corps entier se rappelle le plaisir intense que ça lui procure. Elle SAVAIT maintenant que c’était sa voie : tout son corps, son coeur et son âme lui confirmaient.

Elle a appris à se connaître : elle aime apprendre la piste en douceur avant de pouvoir la « performer ». C’est pourquoi elle a misé cette année sur Shannonville : Round 1 et 5 au CSBK (Championnat Canadien de Superbike) et Super Series, le championnat régional de Shannonville. Pour elle, c’est une entrée parfaite dans le monde de la course puisqu’elle peut pratiquer plusieurs fois sur cette piste.

« JE L’AI FAIT ! J’AI RÉUSSI! »

Au moment où elle a franchi la ligne d’arrivée en première position, le drapeau à damier a déclenché une bouffée d’émotions. Elle a eu dans la saison deux 3e places, une 2e, une 5e, une 6e place, mais c’était sa première « 1ere place »!

Si un micro avait été dans son casque, j’ai entendu dire qu’on y aurait entendu tomber un gros Tbnk *ustensile d’Église.

« JE L’AI FAIT ! J’AI RÉUSSI! ».

Comme si toute la pression du monde venait de s’anéantir en une fraction de seconde. Son dernier lap de cool down, elle se demandait comment elle avait fait. Elle ne savait même pas encore qu’elle était la première femme à ce moment-là.

Ses conseils pour les femmes qui aspirent à se lancer dans le monde des sports motorisés?

• D’abord, il faut le faire pour soi et persévérer, malgré les difficultés. Tu as de la misère dans ton cours de circuit fermé? Continue. Tu doutes de tes capacités? Continue. Tu as échappé la moto plusieurs fois? Elle aussi et elle a persévéré. Selon Cath McKenzie – et je seconde, c’est un monde d’opportunité et de plaisir en train de s’ouvrir à toi.

• Pour celles qui voudraient essayer la piste : sans équivoque, il faut aller à Montmagny! C’est l’endroit où il y a le plus de temps de piste. C’est une piste qui est très technique alors la vitesse est moins intimidante. Tout le monde est inclus et l’ambiance est géniale. Cath recommande de parler aux autres : « tu vas apprendre de tout le monde et agrandir ton cercle d’amis moto. »

• Pour celles qui veulent s’améliorer, elle recommande de butiner : apprendre de différents coachs, essayer d’autres pistes pour découvrir d’autres courbes, différentes vitesses.

• Dans tous les cas, il faut faire fi des autres et rester « focus » sur ses choses à soi. Elle reconnaît que c’est plus facile à dire qu’à faire, mais quand les pensées négatives arrivent, elle suggère de se reconnecter à soi et pourquoi on le fait. On le fait pour soi!

• Elle recommande aussi d’éviter de se mettre de la pression : la progression vient chacun à son rythme. Sans aucun doute, la constance et la pratique amènent toujours des résultats. Savoir regarder les autres plus rapides, sans envi ni désarroi, mais plutôt comme une opportunité pour en apprendre plus. En roulant avec des pilotes plus avancés que soi, on devient meilleurs nous-même. C’est en suivant les autres qui sont un peu plus rapide que soi que nos propres temps s’améliorent.

Sa vision pour la place des femmes

• Dans la catégorie Novice de la série Super Series, elles sont 3 femmes sur une quinzaine de coureurs.
• Dans la catégorie Amateur, il y a 1 femme sur près d’une trentaine de pilotes.
• Aucune femme n’est encore inscrite dans la catégorie Pro.
• Dans le CSBK, on en compte peut-être une dans les amateurs, et aucune dans la catégorie Pro.

Elle croit qu’il y a un certain avantage d’être une femme dans ce domaine traditionnellement dominé par les hommes. Les hommes témoignent en général d’un respect du fait qu’une femme se bat contre eux et ils sont toujours prêts à t’aider, c’est aussi simple que ça!

L’envers de la médaille, c’est qu’ils sont aussi orgueilleux : ils ne veulent pas être battus par une fille!

Elle croit que les femmes peuvent être avantagées car c’est aussi un jeu stratégique : les femmes sont en général plus réfléchies. On analyse avant de tourner la poignée ! Ce qui nous amène souvent à prendre moins de risques. Avec un crash, on n’a aucun point. La « game » se joue beaucoup sur le long terme.

Pour elle, la présence de Vanya Gulco qui la supporte est essentielle. Je ressens toute la gratitude qu’elle a d’être accompagnée par son Fiancé à toutes les étapes. Plus l’étape est difficile à franchir, plus le travail est intense, plus la reconnaissance et la fierté sont grandes. C’est important d’être entourée de gens qui croient en nous et qui nous laissent se mettre en premier plan.

On dit MERCI Vanya, merci d’être là pour la première femme à remporter la première place aux Super-Séries!